jeudi 26 avril 2018

Critique : Barbie Princesse de l'île merveilleuse


Je commence véritablement ma chronique des films de Barbie, du pire au meilleur.  En commençant par celui que je n'ai pas pu finir,  Lilipucia.



 Est -ce bien un film de Barbie d' ailleurs  ? En fait,  Lilipucia est une petite fée blonde,  comme Barbie,  mais la ressemblance s' arrête là. Elle est capturée par une fillette dont les parents sont les industriels qui s' apprêtent à détruire le square où vit Lilipucia et ses copines. ..Il y a une morale écologique évidente,  ça part d' une bonne intention,  mais c'est une morale à subtilité d' enclume. De plus le film avait lieu à l'époque moderne,  alors que ce n' était pas encore la norme(en 2009).  Ça n' a pas été si dur de s' y habituer après La magie de la mode, l' année suivante   ( du moins pour moi) mais à l'époque,  ça m'a sortie de Lilipucia et je ne l'ai pas vu en entier. Si Mattel souhaitait   lancer une nouvelle franchise,  disons que ça n' a pas marché.

Poursuivons avec Barbie princesse de l île merveilleuse  ( 2007), vu en entier mais le moins enthousiasmant pour moi.



Sur une île déserte , un paon et un panda rouge, Azul et Sagi,  découvrent une enfant de sept ans échouée sur la plage,  avec sa malle de bagages. La malle s' orne d' un blason et d' une étiquette déchirée, on ne peut lire que la première syllabe, "Ro" . Les animaux surnomment ainsi la fillette (oui, je sais,  c'est  laid), car elle est amnésique et ne sait plus son vrai nom.



10 ans plus tard,  Ro a grandi entourée de Sagi,  Azul et Tika,  une petite éléphante née entre temps.



Et elle peut leur parler.  Ce n'est peut être pas si étonnant,  Tarzan aussi parle singe à leur contact. Mais Ro,  elle,  parle  à toutes les bêtes, y compris,  plus tard dans le film,  à un cheval alors qu'elle n' en avait jamais croisé sur son île.


 Langage universel animal? Peut-être , dans les films  Barbie, les  bêtes se parlent les unes aux autres par delà les différences d'espèces. Déjà bizarre, mais en plus de là à imaginer qu'une humaine puisse apprendre et surtout articuler ce langage... Autre problème pour la suspension d' incrédulité,  Ro qui est parfaitement coiffée  et maquillée,  en dépit du fait qu'elle vit sur une île déserte.



Jusqu'au jour où le prince Antonio,  grand explorateur devant l' Éternel,  aborde son île avec son équipage . Surprise, Ro n' a aucun problème à leur parler! Elle savait le langage humain avant son naufrage, mais avec tout ce temps à ne plus le parler, elle aurait dû avoir ne serait-ce que des difficultés à l'articuler à nouveau, comme Dressée avec le poing dans Danse avec les loups.



L' équipage  propose de ramener la demoiselle à la civilisation avec ses trois amis animaux . Elle accepte, et bien sûr Antonio et elle tombent amoureux en route.


  Il y a juste un problème : arrivés dans le royaume du prince,  Apollonia, celui-ci est censé épouser sous peu une princesse qu' il ne connaît pas,  Luciana.  Et le fait qu'on ne sache pas d' où sort l' amnésique Ro ne plaide pas en sa faveur pour être une prétendante crédible.





Ce film de Barbie reste sympa pour le public de petites filles visé.  Mais il présente quelques défauts majeurs,  les plus gros d' un film de la franchise selon moi.

Premièrement,  c'est une robinsonnade comme Seul au monde.



 Entendez-par là,  une histoire de naufragé solitaire sur une île déserte,  puis le retour à la civilisation. Avec tous les passages obligés: travailler dur pour se construire un abri ou filtrer l' eau, déprimer  à cause de la solitude,  être de plus en plus négligé vestimentairement et du point de vue cosmétique.




..et si le naufragé retrouve la civilisation avant que sa solitude complète ne le rende fou, il aura le plus grand mal à se réadapter à la vie en société,  comme on dit.



Et là. .. et bien, Ro est, je l' ai dit, vêtue d' un simple pagne, mais bien coiffée et maquillée.  Elle ne souffre pas de solitude rapport à l' absence d' un autre être humain, ni de perte de raison qui y serait liée .  En fait, au début du film, elle chante à quel point elle aime son ile et que la vie y est belle...



Non, vivre là,  pas de problème,  comme elle le dit plus tard au royaume d' Antonio alors qu' on s' inquiète légitimement de son isolement passé.

Ro a été naufragée à 7 ans. C est aussi le cas des héros du Lagon bleu et ils en sont très naïfs.



 Pas elle, en dépit du fait qu' elle aurait dû oublier comment lire et écrire faute de pratique. Elle sait même énormément de choses comme le langage des animaux et la science des plantes, y compris curatives. Sa puberté ne l' a apparemment nullement affolée . Et surtout: elle a d' exquises manières.



La fiction regorge d' enfants dits sauvages,  comme Mowgli ou Tarzan.  Mais aussi quelques uns bien réels comme Victor de l' Aveyron , ou Amala et Kamala .




Ils n' ont jamais su parler,  ont dû subir un long apprentissage de port de vêtements,  de la propreté,  de la station debout et de la  marche . Ro, me dira- t- on, a été naufragée enfant, et non bébé?  Oui, mais néanmoins,  quand on vit seul on a tendance ne serait ce qu' à s' avachir à table. Ro n' a aucun problème pour porter des robes à crinolines et à corset pour la première fois, n' est pas déconcertée par les mets qu' on lui sert, se tient droite sur sa chaise et sait d' instinct qu' elle doit commencer par les couverts de l' extérieur.


Les reproches d' Ariana, la mère de Luciana, sur la "sauvage" , n' ont guère de sens.



Deuxième souci, les chansons.  Certains ont une véritable allergie envers les chansons dans les films d' animation, en particulier de Disney, disant détester quand "ça chante" .


Parce qu' on les entendrait trop, reprises un peu partout, mais aussi parce que l' action en  serait ralentie. Même Disney a conscience de cette phobie,  et c' est pourquoi dans Vaiana le personnage de Maui lance: "Si tu chantes, je te tape!" . Alors qu' il ne s' est pas gêné pour le faire une demi- heure plus tôt et Vaiana aussi.



Chez Disney, moi, ça ne me gêne pas quand ce n' est pas musical  (Les nouveaux héros,  Zootopie, Atlantide l' empire perdu, Le chaudron magique) car en effet le genre peut s' en passer aussi bien que le live action.



Mais quand les personnages chantent, (on dit les personnages,  pas "ça " ) non plus. Au cinéma néanmoins : devant les séries d' animation Disney j' ai pu ressentir ce fameux effet de longueur car les chansons sont moins travaillées.

                                            (Ils viennent pourtant de dire qu'ils sont pressés)

 Mais elles sont généralement bien, même a la télé.



Dans les long métrages, les chansons arrivent à propos,  font avancer l' intrigue, sont belles, et il n' y en  a guère plus de cinq, un chiffre raisonnable.  Faites le compte : la  chanson d' intro, celle du héros, celle du comique de service, la  chanson romantique et la chanson du méchant.  Oui, en général dans cet ordre.

Princesse de l' ile merveilleuse est un long métrage même s' il a été diffusé à la télévision. Mais hélas question musique il n a pas retenu les leçons de Disney,  même si d' habitude les chansons de Barbie sont sympas,  et un point fort...sauf ici. A l' inverse des chansons Disney qu' on a envie de reprendre en chœur, elles sont banales,  musicalement parlant,  et les paroles peu recherchées. Ces numéros musicaux tombent comme des cheveux sur la soupe et ne font pas avancer l' intrigue.


Sauf la chanson de la méchante, la reine Ariana, qui révèle  son passé,ses motivations, et  son plan diabolique; elle n' en reparle jamais ni après ni avant. Pour comprendre, il faut donc écouter très attentivement.

Ou sinon,  on peut rater le fait qu' Ariana est fille de nobles d' Apollonia, qu' ils ont comploté contre les  souverains, que cela a valu l' exil à toute cette famille.  Plus tard seule survivante, Ariana a appris l' art des poisons, et a réussi à épouser rien moins qu' un roi, qu' elle tue après avoir conçu Luciana. De retour à Apollonia, personne n' a reconnu Ariana.
Et elle compte bien venger les siens en finissant le travail et en empoisonnant la famille royale d'Apollonia; une fois  Luciana devenue leur héritière par le mariage.



Autant dire des infos capitales...le problème c' est qu' on a pas envie d' écouter.  Le débit est saccadé, proche du discours mis  en musique de façon forcée.  Petite leçon de Disney : la chanson du méchant peut expliquer son plan mais pas ses motivations originelles et si c'est le cas, la chanson doit rester agréable à écouter.



                                                                 (HELL YEAH!!!!)

Un discours classique eut été plus approprié , pas forcément toute seule, mais en parlant à ses rats...Oui,  Ariana a des rats acolytes.

Le pire, c'est qu' il y a huit chansons,  soit beaucoup trop.



Une fois n'est pas coutume,  les auteurs de Barbie se seront pris les pieds dans le même tapis que les concurrents de Disney de bas étage : des chansons tout le temps,  et pas forcément très mémorables. La valeur ajoutée des comédies musicales est de donner envie de les chanter à tue-tête mais ici, ce n'est pas le cas.



En fait, on est proche du discours forcé en général.  Donc quand la dernière chanson s' est faite entendre près de la fin, j' ai appuyé sur avance rapide en effet.






Les acolytes animaux trop choupis,  on n' en manque donc pas ici. Mais ils ne sont pas une valeur ajoutée,  surtout Tika. L' éléphante est peut être mignonne,  mais rudement égoïste.  Elle craint, à tort, que Ro ne s occupe plus d' elle si elle a un amoureux. ..et détruit volontairement une lettre d' Antonio à un moment critique.  Les bestioles dans Barbie ne sont  pas toujours très utiles bien sûr, mais au moins elles ne mettent pas le souk dans les relations des héroïnes.  Tika et sa jalousie mal placée ne sert non seulement pas à grand chose,  mais c'est le seul acolyte animalier qui en plus mettra des bâtons dans les roues.

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Dernière faiblesse,  la morale de l'histoire.  Antonio rend assez clair le fait qu'il place le mérite personnel au dessus la naissance.  Si Ro lui plaît alors il la juge convenable en dépit d'origines inconnues et donc sûrement modestes.  Il préfère la fille venue d'on ne sait d' où à la princesse.



Et comme ses parents ne le comprennent pas,  Antonio est ensuite prêt à renoncer à tous ses devoirs.  Il ira jusqu'à affirmer qu'il veut fuir avec Ro et renoncer au trône, le laissant à ses petites sœurs  (donc Apollonia n'a pas de loi salique,  tant mieux ).

Le mérite personnel,  s'accrocher à ce qu'on veut vraiment,  c'est bien n'est ce pas ?  Oui, sauf que les révélations finales balaient tout ceci. Ro commence par remarquer un blason orné d'une rose, semblable à celui qui est sur sa vieille malle. Le blason est celui du royaume de  Paladia, dont la reine,  Marissa, est invitée au mariage.



Jusque là,  le seul souvenir pré- naufrage de Ro était une berceuse,  mais récemment elle a eu un flash: son vrai nom,  c'est Rosella. Entendant ce prénom, Marissa révèle qu'elle a une fille disparue qui s'appelle comme cela. Toutes deux connaissent aussi la  berceuse,  donc Rosella est bien la fameuse fille perdue.



Il n'y a pas de mal à ce que Rosella soit la princesse de Paladia après tout.  Je veux dire,  c'est la bonne surprise supplémentaire après avoir retrouvé sa mère.  Mais, la morale en paraît toute différente. Les parents d'Antonio acceptent Rosella pour belle-fille dans la foulée , mais pour quelle raison le font- ils vraiment ?  Parce qu'elle les a impressionnés en fabriquant l' antidote au poison d'Ariana ? Ou parce que finalement elle appartient à la même catégorie sociale qu'eux? On ne peut pas en être sûrs et ça flingue le message.  "La valeur personnelle ?  Bof, ça n'aura jamais tant d'impact que l' accident de la naissance. "


Et puis, malgré que le responsable soit surtout l'âge du film, cette époque est celle du graphisme "raide". Donc ce n'est pas le plus agréable à regarder.

"Barbie plastic, it's fantastic!"


Un bon point du film, néanmoins,  est le personnage de Luciana. Certes elle a le rôle de la rivale, mais n'a rien de la Lana habituelle. En fait, c' est la rivale la plus adorable, sensible et prévenante que vous puissiez imaginer.



La vraie méchante, celle qui exige le mariage arrangé pour servir ses intérêts,  est Ariana . En fille docile et bien élevée, Luciana s'y soumet...Et pourquoi Antonio n'aime -t-il pas une fille si gentille ?




En discutant, ils découvrent vite qu'ils n'ont pas du tout le même style de vie  (elle est loin d'être aussi aventureuse ). Et à ce point de l'histoire le cœur du prince était déjà pris de toute façon.    Luciana le remarque,  et étant romantique,  ne souhaite rien d'autre à ce stade qu ' un homme qui la regarderait comme " Antonio regarde Rosella " .



Elle veut faire un mariage d'amour,  c'est bien légitime,  n' est pas amoureuse d' Antonio,  et est touchée par l' histoire de ce prince avec Rosella.  Luciana deviendra finalement plus une alliée qu'une rivale. C'est rare, même dans les films Barbie , ce qui explique que Luciana soit restée dans les mémoires.

Mais elle est sans doute sympa, parce qu'elle a une poupée...


Malgré ce bon point, ça ne rattrape pas le fait que, si elle est convaincante dans bien des rôles,  Barbie ne va pas du tout avec les robinsonnades. Si bien sûr,  elle reste impeccablement coiffée et maquillée.  Dommage,  ça aurait pu passer dans une histoire d'exploratrice ou de pirate. Je regretterai toujours,  d'ailleurs,  que ce thème voisin n' aie jamais été abordé. ..

D'autant que la poupée existe, là aussi!


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